Le « vouloir-être-intelligent » : sur le style compliqué de Roland Barthes
Résumé
À quoi tient la complication du style chez Barthes ? Non à un lexique scientifique
(ou cherchant à le paraître), non à une syntaxe déroutante, mais à une énonciation
jouissivement élitiste, qui se refuse à l’explication et encore plus à l’explicitation de ses
thèses. Possédé par un « vouloir être intelligent », masque mandarinal de la peur d’être bête et
mal aimé, Barthes « égare » les naïfs au moyen de trois procédés : l’allusion, le paradoxe, la
modalisation. Il crypte ses références intertextuelles (allusions et name-dropping) ; pour
produire à jet continu surprises et coups de théâtre (des paradoxes !), Barthes passe du coq à
l’âne (selon le rôle dévolu au fragment, au satori, au délié) ; enfin il pratique la modalisation,
la glose, l’ironie en roue libre, multipliant les second degrés. On ne lit Barthes qu’à
l’université, tant ses essais, pour être déchiffrés, requièrent de culture savante : seule la crème
des lecteurs s’y retrouve, quand l’étudiant non aguerri s’y perd. Pourtant il y a une tentation
de Barthes pour le style simple, dépouillé à l’extrême, l’anamnèse comme variante puritaine
de l’épiphanie, soit le relevé (tremblant) d’une émotion. Mais pourquoi le style simple ne
prend-il pas ? De fait, il ne s’impose pas, ne procède que par trouées sur fond d’une écriture
vouée à la complication, à l’infusion d’une culture hyper-intellectuelle dans le rendu d’un
quotidien hédoniste et bourgeois, faussement simple.
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